Roy Ayers s’est produit au New Morning en mars dernier. Nous y étions. Roy vient de fêter ses 75 ans, alors pour l’occasion, le voici en interview. Si sur scène le vibraphoniste chante moins qu’avant, remplacé le plus souvent par John Pressley, l’aura de son répertoire est toujours là. Entretien avec un éternel gamin à l’humour droopyesque.
Interview de Julien Le Gros pour Fonkadelica :
Qu’est-ce que vous devenez Roy ?
C’est toujours le même vieux Roy, avec un nouveau groupe dynamique et frais ! On essaie de se maintenir, de continuer à être le plus créatif possible. Chaque fois que je joue en France le percussionniste nigérian Chief Udoh Essiet vient sur scène avec moi. On se connaît depuis l’époque de Fela Kuti, quand on a enregistré « 2000 black ». Fela était et demeure un merveilleux musicien. Un type à vibration. Il savait faire ressentir les vibrations les plus fortes.
Où en sont vos projets discographiques ?
J’ai fait une session en studio avec Talib Kweli et un autre grand rappeur qui sera sur l’album dont je ne me rappelle pas le nom… Kanye West
Cela fait longtemps que vous n’avez pas sorti d’album, depuis « Perfection » en 2006. Le dernier qui a cassé la baraque c’est « Mahogany vibes » en 2004, avec les chanteuses Erykah Badu, Betty Wright…
J’aime les chanteuses. Elles sont adorables. J’ai eu la chance de mettre en avant Dee Dee Bridgewater sur la B.O de « Coffee » en 1973. C’est une diva du jazz.
Il s’interrompt : « Hey poppa c’est du vin ! Ouvre une bouteille ! C’est quel genre de vin? Est-ce que c’est du bon ?»
Roy et Dj CHABIN – Backstage
Comment avez vous été amené à signer cette bande-originale de « Coffy » de Jack Hill en 1973 ?
Il y avait ce producteur, Jerry Schoenbaum, dont le label Verve Forecast records avait été racheté par Polydor qui m’a dit: « Roy est-ce que tu peux faire une musique de film ? » Je n’avais jamais fait ça de ma vie. J’ai accepté. Bien sûr que je peux composer pour le cinéma ! American International pictures la société de production de Samuel Z Arkoff m’a fait déménager de New York en Californie. On a enregistré devant les images. C’était une super expérience. Et Pam Grier ! Mmm! Hello Pam! (Il mime une grosse poitrine)
Parmi les femmes il y a eu aussi la chanteuse Sylvia Striplin, que vous avez produite sur votre label au début des années 80.
Ah oui le groupe Ladies of the 80’s ! C’étaient des filles super ! C’était un projet très funky en 1980. Sur l’album de Sylvia « Give me your love » il y avait déjà « Searchin » dedans ! J’avais mon label Uno Melodic records. J’étais dans une phase transitoire. J’essayais de faire en sorte que les choses continuent à tourner. C’est très dur de vivre en s’auto-produisant. Ce sont les majors qui ont tout l’argent et les moyens pour promouvoir les disques. Rires
Et le fameux projet RAMP en 1977 avec le titre: « Daylight » ?
J’ai adoré produire le Roy Ayers Music Productions. C’était fantastique. C’était une belle expérience bien qu’éphémère. Et un beau disque enregistré à Los Angeles avec toutes mes compositions. Dans le même genre que ce groupe vocal je dois faire quelque chose bientôt avec le chanteur nu soul anglais Omar. Omar m’a dit: « Faisons quelque chose ensemble ». J’ai dit: « Ok allons-y! » C’est un jeune chanteur très populaire et très doué.
« Running away » date de la même époque, avec le Roy Ayers Ubiquity sur l’album « Lifeline »…
C’est un titre hyper fort. Je n’avais absolument aucune conscience que c’était aussi puissant quand on l’a enregistré. C’était un plaisir ! Doo be doo…
Avant d’en arriver au très funky Ubiquity il y a eu toutes ces collaborations avec des jazzmen dans les années 60: Teddy Edwards, Phineas Newborn JR, Hampton Hawes…
Le funk c’est plus grand public mais c’est beaucoup plus facile à jouer! Ça revient à jouer avec du groove. Quand tu fais du jazz il faut savoir improviser. C’est la clé. Ça demande plus d’investissement personnel. Il faut être à fond dans le trip. Ce n’est pas facile. Il y en a qui disent que c’est facile. Mais ce sont des menteurs !
La légende veut que c’est Lionel Hampton qui vous a incité à jouer du vibraphone ?
Mes parents m’ont emmené voir un concert de Lionel Hampton à Los Angeles. Je n’avais que cinq ans. Ma mère a dit qu’il m’a donné une vibration spirituelle. Il m’a donné des maillets de vibraphone à la fin du concert. J’ai ressenti un frisson. ça a jeté les dés de mon destin.
C’est avec ce vibraphone, en imitant les modulations de sa trompette, que vous avez rendu hommage à Miles Davis lors du concert au « Brewhouse theatre » en 1992.
Je suis venu chez lui un jour. Il m’a frappé à l’estomac. J’ai fait : « Oooh ». (Il fait un cri à la James Brown) Herbie Hancock m’a dit : « Quand Miles te frappe à l’estomac c’est pour voir si tu es en forme ». Miles m’a dit avec sa voix caverneuse: « ça va ! Tu as la pêche ! » Vous vous rendez compte Miles Davis qui me donne un coup dans le bide! Goddamn it! Malheureusement je n’ai pas eu l’opportunité de jouer avec lui.
Mais on vous a entendu avec plein de bons jazzmen dans les années 60: Jack Wilson, Gerald Wilson, Reggie Workman…
Reggie Workman c’est un grand contrebassiste, une force d’inspiration. C’était quelqu’un de très positif. Je l’ai connu à l’époque où je jouais avec Herbie Mann. Je me rappelle qu’il m’a dit: « J’ai joué avec John Coltrane! » Ouah! Coltrane c’est un des géants ultimes de mon panthéon personnel. Reggie m’a incité à aller dans la bonne direction et ne pas me contenter de faire de la musique pour faire du fric.
« Memphis underground » avec Herbie Mann en 1969 c’était un très bon album jazz R’n’B
Herbie Mann était un très bon flûtiste. Il jouait plein de styles, de musiques latines, brésiliennes… Mais je n’ai jamais réussi à le convaincre d’aller en Afrique. On a tout fait ensemble, partout. C’était un bon gars mais il n’était pas attiré par l’Afrique.
Ça ne vous a pas empêché d’enregistrer à Lagos avec Fela en 1979
« 2000 blacks got to be free. » Je ne me rappelle plus des paroles exactes. Avant ça j’étais allé en Afrique une dizaine de fois, en Afrique du Sud… Je suis retourné plusieurs fois au Nigéria après ma rencontre avec Fela. Avec lui on a sillonné le pays. On a joué dans des stades. On est allés jusqu’à Calabar dont le nom originel est Akwa Akpa, Benin city. On a même fait Kano et Kaduna au nord. Ce ne serait plus possible aujourd’hui! Les gens en Afrique m’aimaient. On était dans un stade plein à craquer. Fela m’a dit: «N’aie pas peur! » J’ai dit « Je n’ai pas peur »- Les gens t’aiment. Ils vont t’enlever! » Oh shit! On s’est fait enlever par la foule du stade. Ça ne m’était jamais arrivé. C’était magnifique !
Votre collaboration avec le grand Wayne Henderson des Crusaders « Step into your life » date de la même période: 1978.
Il est décédé l’année dernière. Joe Sample des Crusaders aussi. J’ai travaillé avec plein de grands musiciens qui ne sont plus là. Je suis sur l’album « Throwin down » de Rick James en 1982. Il a chanté « Runnin’ away ». C’était mon ami. Il est parti en 2004. Mon dieu! Il y a un truc qui ne va pas! Rick James, Fela Kuti, Wayne Henderson, Herbie Mann, tous ces gars sont morts! Leur musique vit pour toujours. Mais c’est si triste! Il faut garder en mémoire la beauté de l’amour qu’ont partagé ces merveilleux musiciens.
Un autre qui est parti c’est le rappeur Guru avec lequel vous avez travaillé ensemble sur le premier Jazzmatazz : « Take a look at yourself »
C’était super. C’était un jeune homme érudit, plein de connaissances, très bien informé sur le business musical. Il avait étudié à l’Université de Morehouse à Atlanta et avait un diplôme d’administration d’affaires.
Q-Tip a aussi collaboré avec vous
Q-Tip m’a fait un baiser sur le front! Je lui ai dit: « Man c’est la première fois qu’un type m’embrasse sur le front! » Q-Tip m’aime! The Roots aussi! On a fait « Proceed » ensemble. J’aime tous les gens qui ont travaillé avec moi et tous ces jeunes de la nouvelle génération, du hip hop, qui se réclament de moi!
Qu’écoutez-vous en ce moment ?
J’écoute beaucoup de Miles Davis, de Fela Kuti. Je suis persuadé que la musique africaine va prendre de plus en plus d’ampleur. La musique américaine c’est bien. Mais il y a une énergie dans la musique africaine. Fela Kuti c’était le roi de la basse. Les lignes de basse dans son orchestre : Ouah! (Il se met à fredonner « Water get no enemy ».)
Enfin, on ne peut pas faire l’impasse sur « Everybody loves the sunshine »
Je jouais dehors. C’était un jour nuageux. Soudain le soleil darde ses rayons. Alors je me mets à dire «Everybody loves the sunshine »… Un instant magique !
>> Discographie
Roy Ayers warmup+aftershow sets by ATN @ New Morning (30-03-15) by Dj Atn on Mixcloud
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CHICAGO !!
Searching !
mon titre préféré : « Hummin' » ! chaque fois que je l’écoute mon esprit se pose sur un transat 🙂
The Memory
Coffy is the color
It ain’t no sign it’s your mind !
https://www.youtube.com/watch?v=rpJteTgvKT4
In god we Funk
Mais oui!!! 2000 blacks! Ce morceau est de l’or!
2000 blacks got to be free avec Fela!
https://www.youtube.com/watch?v=9Tq28s3T8aE
Searching ^_^
Liquid Love
J’apprécie particulièrement I’m your mind qui est très lourd.
J’ai hésité avec « The third eye », mais mon morceau favori est le classique « Everybody loves the sunshine »!
Mon titre préféré de Roy Ayers c’est Poo Poo La La, et d’ailleurs on essaye actuellement de rebâtir notre relation avec mon ex donc la chanson est vraiment lourde de sens haha… On est des gros fans de Roy et on l’a déjà loupé la dernière fois qu’il est passé à Paris.. Encore une fois le concert est complet et personne ne revend de places (tu m’étonnes)..! Je prie pour que ce concours marche et que je puisse y aller avec elle… that would be magic ! Nan ce serait mieux encore.. !
En tout cas merci pour ce dernier petit espoir, love to you guys 🙂
Everybody loves the sunshine
Don’t stop the feeling !
Super article !!!! pour un super musicien !!! merci… Je ne savais pas qu’il avait des connexions avec Fela… Entre musiciens d’exception…